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samedi 14 juin 2014

La marque (Kushiel, tome 1), Jacqueline Carey


Phèdre nô Delaunay a été vendue par sa mère alors qu'elle n'était qu'une enfant. Habitant désormais la demeure d'un haut personnage de la noblesse, pour le moins énigmatique, elle y apprend l'histoire, la théologie, la politique et les langues étrangères, mais surtout... les arts du plaisir. Car elle possède un don unique, cruel et magnifique, faisant d'elle une espionne précieuse et la plus convoitée des courtisanes. Rien ne paraît pourtant lui promettre un destin héroïque. Or, lorsqu'elle découvre par hasard le complot qui pèse sur sa patrie, Terre d'Ange, elle n'a d'autre choix que de passer à l'action. Commence alors pour elle une aventure épique et déchirante, semée d'embûches, qu'il lui faudra mener jusqu'au bout pour sauver son peuple.



Mon avis : 

Pour moi, ce roman se découpe en deux parties. Elles sont séparées par un événement auquel Phèdre, l'héroïne, fait souvent référence dans la première partie. C’est justement une caractéristique de la première partie : les allusions à des événements futurs. C’est un des aspects les plus intéressants : l’auteure nous met l’eau à la bouche et nous lâche quelques miettes pour qu’on continue à la suivre. En cela, elle est très douée car on en redemande. La seconde partie est plutôt dans l’action, dans l’immédiat de ce que vivent les personnages. C’est moins captivant mais c’est quand même très intéressant, c’est juste moins subtil au niveau des révélations. 


L’histoire est très complète : complots, trahisons, guerre, amitié, amour,… C’est très réel, très crédible, si je peux m’exprimer ainsi pour une fiction. On me dirait que ça s’est déroulé un jour que je pourrais y croire. Même si, comme c’est souvent le cas avec les héros, Phèdre devient omniprésente et indispensable. C'est un peu lassant de voir que rien ne peut se régler sans elle et que limite rien ne se passe là où elle n’est pas (même si ce n’est pas exactement le cas ici et que c’est récurrent quand la narration est à la première personne). Et en parlant de régler les problèmes, Phèdre utilise sans cesse son corps pour tout ce qu’elle veut faire faire à un autre personnage. Si c’est assez logique quand on connaît sa nature et les circonstances, c’est parfois totalement déplacé : il y a des personnages avec qui ça ne devrait jamais arriver. Je ne veux pas spoiler mais certains rapports m’ont paru totalement inappropriés. 


Les personnages sont nombreux et intéressants. Dans certains romans, les personnages secondaires sont fades, inutiles ou juste bons à remplir un rôle bien précis, ce qui les réduit à un statut d’objet. Ce n’est pas le cas ici, même les personnages les moins importants ont une vraie personnalité, une espèce de dimension réelle que j’apprécie toujours. Phèdre n’est pas celle que j’ai préférée, même si elle est assez attachante et que l’auteure a su gérer son talent particulier. En effet, Phèdre ressent le plaisir dans la douleur. Les relations qu’elle a avec ses clients sont toujours bien racontées, ça n’est jamais vulgaire et surtout c’est assumé. On ne ressent aucune culpabilité, aucun jugement de la part de l’auteure ou du personnage à propos de ce qu’elle a ou ce dont elle a besoin. Si jugement il y a, il vient d’autres personnages et on comprend bien pourquoi ils peuvent éprouver un certain malaise mais en tant que lecteur, je n’ai jamais été gênée par ce que fait Phèdre ou ce qu’on lui fait. Mon personnage préféré est Joscelin, même si il est amené à faire des sacrifices, il en assume les conséquences sans pour autant les accepter avec facilités. J’ai eu plus de mal avec Hyacinthe, je ne me suis pas trop attachée à lui et suis restée assez indifférente à son sort. J’ai adoré Mélisande, elle est au centre de tout et son talent pour les manipulations est impressionnant. Je ne cite pas d'autres personnages mais je pourrais facilement faire un paragraphe sur chacun d'entre eux.


Le style est tout simplement magnifique. Dans la première partie, c’est très flagrant : les phrases sont belles, longues sans qu’on perde le fil. C’est fluide, agréable et jamais lourd malgré la richesse des phrases. La plume de l’auteur est à l’image de la complexité de l’intrigue et la richesse de l’univers. Même si certains éléments font clairement référence à des religions existantes, c’est plutôt bien construit et assez original. Je ne le décrirai pas plus, c’est trop riche pour le faire en quelques lignes et Phèdre le fait très bien.


C’était un vrai plaisir à lire ! C’est un livre auquel il ne manque rien et malgré quelques minuscules défauts, c’est un coup de cœur.



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